8.8.06

Had to cry today

Bon vous l’aurez peut-être compris, bien qu’annoncé ré-annoncé et réré-annoncé il n’y aura pas de longue chronique concernant L’Italienne à Alger de Rossini au Grand Saint-Jean; ça fait des semaines que j’y suis allé, le Festival d’Aix est fini depuis des plombes, en plus c’est passé à la télé donc tous ceux que ça intéressait ont eu l’occasion de se faire leur propre idée (ce qui est l’essentiel en ce genre de matière), et puis je manque cruellement de temps pour faire ce que je DOIS faire en dehors de ce blog.

Donc pour résumer vite fait:

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– mise en scène sympathique et plutôt plaisante, à défaut d’être géniale-géniale; un peu too much parfois (Isabella drapée dans le drapeau italien, c’était une revanche après la finale du Mondial non?... surtout quand on prend la peine d’expliquer dans le programme qu’il s’agit d’un des premiers opéras exprimant le sentiment national italien, c’est léger comme gag), un peu statique aussi, mais le metteur en scène (Toni Servillo) a plutôt privilégié l’expression faciale, et il faut dire que de ce côté-là c’était parfois franchement réussi, notamment avec Marco Vinco dans le rôle du bey, hilarant dans la scène du pappataci.

– côté musique proprement dite, eh bien là encore plaisant (parce que c’est du Rossini, tout de même, et pas du moins inspiré), mais pour ma part je n’ai pas été totalement enthousiasmé, j’attendais quelque chose d’autre de l’interprétation... d’un peu moins “enrobé” dans le chant, plus précis et articulé pour bien rendre la joyeuse folie de certains moments, là tout se brouillait souvent dans une pâte sonore indifférenciée... du coup le premier acte (le plus fertile en arias virtuoses) m’a laissé un peu sur ma faim, mais ce problème s’est moins posé dans le second (moins d’arias virtuoses: C.Q.F.D.), ce qui m’a permis de mieux l’apprécier... À noter que si Maxim Mironov faisait un peu gringalet (scéniquement et vocalement) dans le rôle de Lindoro, Christianne Stotijn était une Isabelle très acceptable, en dépit du défaut signalé plus haut (mais commun à tous, je crois qu’il faut soupçonner Riccardo Frizza à la direction musicale pour la responsabilité de la chose), tandis que, surtout, Marco Vinco (Mustafa), encore une fois, et Giorgio Caoduro (Taddeo) tiraient en toute beauté leurs épingles du jeu.

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Alors bon comme ça j’ai l’impression de tout critiquer, mais je le répète, le spectacle était globalement plutôt plaisant, même si, même si, même si (ah, ais-je parlé de l’acoustique du lieu qui m’a paru loin d’être top aussi?...), même si voilà, j’aurais bien aimé que ce soit le niveau un peu “au-dessus” par moments... et puis bon, comme je vous l’ai dit aussi , c’est vraiment une chronique vite fait. J’aurais pu plus développer et nuancer, mais voilà, je vous l’ai dit, je manque cruellement de temps en ce moment.

En fait il ne me reste plus que quelques semaines pour:

– boucler mes deux mémoires (ça avance, ça avance, je vois le bout du tunnel, mais tout de même...);

– lire tous les ouvrages au programme de l’agrégation (dix-sept titres);

– et euh... on va dire, “réviser” mon latin...

Or j’ai du retard sur mon programme dans ces trois domaines!

Le programme de lecture côté agrégation, on va dire que c’est assez musclé (en même temps je soupçonne que c’est un peu fait pour). Un anonyme médiéval, Marot, Molière (trois pièces), Prévost, Chateaubriand, Saint-John Perse, plus deux programmes de littérature comparée: Maeterlinck / Ibsen / Stinberg / Witkiewicz d’un côté, Rabelais / Cervantès / Sterne de l’autre (et je ne parle pas des programmes de langue: latin, langue vivante étrangère, ancien français, grammaire moderne). Encore, j’ai de la chance, parce que le programme est plutôt attractif cette année, alors que franchement ceux qui l’année dernière se sont tapés Chénier et Marguerite Duras! les pauvres, je les plains. Seulement voilà, même si c’est attractif (pour la plupart des titres en tout cas, parce que tout de même, l’Itinéraire de Paris à Jérusalem de Chateaubriand.... burps...), il y a quand même un certains nombres de pavés dans le lot – vous savez, le genre de bouquins qui vous font mal aux pieds quand ils vous tombent des mains, comme disait Céline. Bon il y a un certain nombre de pièces de théâtre, ça c’est bon, ça se lit vite – le principe d’une pièce de théâtre (enfin pour la plupart d’entre elles) étant d’être représentée en moins de quarante-huit heures, la lire n’est pas beaucoup plus long que d’y assister... Par contre, pour la Suite du Roman de Merlin (dans les 750 pages dans la traduction en français moderne, 550 environ dans le texte), Cleveland de Prévost (un bon millier de pages), sans parler du Don Quichotte de Cervantès (deux volumes de 600 et quelques chaque), ben ça ne se lit pas en une après-midi. Et je ne parle même pas de commencer à m’attaquer à la littérature critique sur les sujets au programme – genre les deux livres de Patrick Dandrey sur le thème de la médecine chez Molière, soit deux fois 800 pages et des poussières...

Alors du coup, quand on se dit qu’il faut lire tout ça avant la rentrée, pas question de lire autre chose à côté. Ce qui est très frustrant.

Pour ceux qui n’ont jamais eu l’occasion de pénétrer dans mon antre, imaginez une pièce dont les murs sont à 80% cachés, essentiellement par des étagères, la majorité de celles-ci supportant un nombre disons relativement considérable de livres (sur deux épaisseurs parfois). Je me souviens de m’être bien marré il y a des années de ça en lisant un texte d’Umberto Eco (dans Comment voyager avec un saumon) sur la façon dont on avait à justifier une bibliothèque privée face à la question inévitable: «Tu les as tous lus?». Bon je suis (encore?) loin de la bibliothèque que doit posséder Umberto Eco, mais enfin il arrive que ça impressionne tout de même certains visiteurs de passages. Donc, NON, je n’ai pas lu tous les livres qu’il y a chez moi, j’en ai lu un certain nombre, mais il y en aussi pas mal que j’ai acheté parce qu’ils m’intéressaient sur le moment et puis que je n’ai jamais commencé, et un nombre plus grand encore que j’ai commencé et abandonné en court de route, plus ou moins rapidement, soit qu’ils ne m’aient pas intéressés, soit (le cas sans doute le plus fréquent) que j’aie croisé un autre texte qui m’ait détourné du précédent par l’attrait difficilement résistible de la nouveauté: les inclinations naissantes ont des charmes inexplicables (je crois me souvenir que Claire était un peu inquiète de cette sorte de donjuanisme littéraire que je pratique...). Il y a aussi les lectures que je me réserve, pour plus tard: genre «un jour je lirais»... La Guerre du Péloponnèse de Thucydide... les Confessions et La cité de Dieu de Saint Augustin... etc. .... la liste se poursuivant de siècle en siècle jusqu’au Livre de l’intranquillité de Pessoa. Mais ils sont là, tous, les lus, les presque-lus et les non-lus, quelque part, plus ou moins bien rangés et accessibles, dans le pire des cas je sais à peu près ce qu’ils contiennent, et parfois – de plus en plus fréquemment depuis quelques temps, d’ailleurs –, il m’arrive, pour une raison ou pour une autre, de repartir à l’assaut d’un livre délaissé en son temps; de farfouiller dans le millier-et-quelques-centaines de livres de poche qui tapissent mes murs, de le retrouver, et cette fois-ci, de le dévorer.

En général, le fait que je lise un livre d’une traite sans m’arrêter et sans céder au chant des sirènes d’un autre texte passant par là, quelque soit la taille du volume d’ailleurs, est un assez bon indicateur de l’intérêt que je porte et porterai pour les années à venir au dit livre – mais le phénomène a pu aussi se produire parfois avec des livres dont j’avais, justement, entrepris la re-lecture (l’exemple canonique étant La Chartreuse de Parme de Stendhal, abandonné en plein débarquement des troupes napoléoniennes à Milan au collège, puis euphoriquement dévoré ensuite dans les RER lors d’un séjour à Paris quelques années plus tard, et que je place depuis comme mon “livre préféré”).

Tout ça pour dire que l’autre jour, je ne sais pas trop pourquoi, mais je tire de son étagère La Foire aux vanités de Thackeray et que je mets à lire... la préface de l’auteur... puis le début du premier chapitre...... et là je sens soudain que je tombe sous le charme de l’écriture, que je suis parti pour une de ses lectures où je suis comme aspiré par la suite du texte, bref qu’il y a de fortes chances que je ne le lâche pas avant d’en être venu à bout. Sauf que dans le contexte de cet été, de fortes chances, ce sont de forts risques. Alors non, quand on a le programme de lectures obligatoires que j’ai – et en dépit du fait qu’une lecture obligatoire est toujours par nature moins attractive qu’une autre –, on ne se lance pas dans la lecture d’un autre roman dépassant le millier de pages, a fortiori quand on sent qu’il y a un fort risque qu’on ne le quitte pas avant la fin. Déjà je me suis permis une petite (et au demeurant délicieuse) escapade buissonnière en début d’été avec Mademoiselle de Maupin de Gautier, maintenant, stop. Stop, et sniff, aussi. À regret, j’ai reposé La Foire aux vanités sur son étagère.

Exit donc Thackeray de mes lectures estivales, exit aussi mes projets de Crébillon, de Diderot, de Radcliffe, de Stendhal, de Vigny, de Dumas, de Barbey d’Aurevilly, de Mishima et de Calaferte, de Philip Roth et de Sylvie Germain, sans parler de l’intégrale de la Recherche du temps perdu de Proust que je projette de lire un été depuis... pfff au moins depuis le début de mes années lycée (en plus maintenant ça y est, on me l’a offerte à Noël, la Recherche en un volume en Quarto / Gallimard... volume qui me nargue depuis: osera me lire, osera pas...). Mais il y a encore plus rageant.

En fin de terminale, j’avais réussi à débusquer au fin fond du CDI de mon lycée, dans des rayons où personne n’allait jamais, une vieille édition Budé du Don Juan de Byron, que j’avais commencé à lire et adoré. Sauf que c’était la fin de l’année, de ma dernière année sur place, et que je découvris en me rendant à la librairie à côté du lycée (qui a d’ailleurs fermé depuis, tempus fugit...) qu’aucune édition plus récente – non seulement au format poche, mais sous aucun format – n’était disponible. Introuvable, le Don Juan de Byron. Impossible de poursuivre ma lecture.

Et maintenant devinez quel texte Gallimard décide d’éditer en poche PILE AU DEBUT DU MOIS DE JUILLET ??

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Cinq ans! Cinq ans (et un ou deux mois) que je l’attends ce bouquin, et ils le sortent quand je n’ai matériellement pas le droit de m’accorder l’autorisation de le lire!

C’est ignoble comme procédé!!

BANDE DE SALAUDS !!!!