6.8.07

Je reviendraiii à Montréaaaal...

... mais en attendant ce jour que j’appelle de mes vœux, c’est via la Grande Toile que nos ‘‘cousins’’ d’outre Atlantique trouvent encore le moyen de m’enchanter.

Avant d’aller plus loin, il faut que je vous avoue une de mes douces petites manies. Elle me prend de temps en temps depuis quelques années. Il s’agit de laisser benoîtement traîner mon oreille, captant ainsi au passage des bribes de conversations en provenance des gens que je croise. La rencontre auditive est nécessairement courte: une, deux, trois phrases au maximum. Je crois que cela a commencé pour moi avec cette phrase entendue dire par une fille à l’adresse d’une autre dans une allée de Fnac parisienne: «J’ai essayé d’être aussi gentille que possible avec lui, tu vois, pour pas qu’il souffre trop...» – phrase qui, bizarrement, m’a fait tout de suite penser que le pauvre gars avait dû salement déguster. Depuis, et notamment quand j’ai un trajet un peu long à faire à pieds en ville (activité peu enrichissante généralement, vous en conviendrez), il m’arrive régulièrement de m’amuser ainsi à mettre mes oreilles en mode ‘‘radar’’.

Cela donne quelquefois des saynètes amusantes en elles-mêmes (lui, surgissant dans une rue en provenance du Cours Mirabeau, à Aix, et criant: «Mais ce qui m’énerve c’est que tu sois pas capable de gérer ce genre de situations!»; elle, voix douce: «Mais je suis calme moi, c’est toi qui...»; lui : «Mais non!!! Mais non, t’es pas calme!!»). Mais le plus souvent, on ne capte ainsi que des fragments, et l’on peut alors rêver tout à son aise au contenu du reste de la conversation. Car – vous l’aurez peut-être deviné, ou compris, ou pas – ce qui me fascine dans cette activité, c’est justement son aspect fragmentaire, cette possibilité qu’elle offre, dans ce monde où nous parlons tous les uns à côtés des autres en étant persuadés que personne ne nous entend, de jeter un coup d’œil par une porte brièvement entr’ouverte (je ne serais pas assez diabolique pour parler de soupirail) dans des histoires dont on ne connaîtra jamais ni le début, ni la fin, ni vraisemblablement le sens, des histoires que l’on peut se plaire à imaginer quelques instants, des histoires qui sont le quotidien de tous ces gens anonymes que nous croisons ordinairement sans leur prêter attention.

Je n’ai jamais été, toutefois, jusqu’à noter ces brimborions de phrases, et il y a d’ailleurs des moments où je le regrette profondément. Eh bien, et c’est là que j’en reviens à la Belle Province, il y a des Québécois qui, eux, non seulement l’ont fait, mais on été jusqu’à créer un blog collectif pour mettre en ligne leur moisson: je viens de tomber dessus par des hasards dont je vous passe le détail, ça s’appelle «Entendu à Montréal...»
tout simplement –, c’est en activité depuis le mois de janvier et visiblement ils ont déjà pas mal fait parler d’eux (ahah!) dans les médias locaux (presse, radio, télé, rien que ça). Le site, qui se décrit comme un «répertoire d’absurdités, de citations hors contexte et de dialogues attrapés dans des endroits publics», offre ainsi des pages et des pages de ces morceaux de conversations qui, visiblement, ne sont pas tombés dans des oreilles de sourds. L’objectif n’est sans doute pas tout à fait le même que celui de mes flâneries auriculaires, mais s’en rapproche par certains aspects, et j’ai un peu l’impression, à parcourir ce blog, de me balader à nouveau par les rues de Montréal. Ajoutons enfin que, de la réflexion frappée au coin du pas-bon sens aux historiettes les plus sordides, le lecteur y trouvera amplement matière à des éclats de rire aussi joyeux que nombreux – le tout avec l’accent local.

Je trouve ça jouissivement tordu et complètement génial.